Je me considère depuis toujours
comme une femme d’image.
C’est ma nourriture : vitale, énergisante,
source de joie et d’émotions.
Laissez-vous emporter dans mon
monde de photographe plasticienne
qui ne s’interdit rien…


-Hélène Brugnes-

Actualités

JOURNAL AU TEMPS DU CHAOS – NAISSANCE D’UN PROJET

LE JOURNAL AU TEMPS DU CHAOS

A 85 ans, ma mère apprend qu’elle est atteinte de dégénérescence maculaire. On parle d’une
tache noire qui va désormais s’étendre et dégrader la perception au centre de son champ
visuel. Petit à petit nous comprenons, elle comprend, qu’elle entame un chemin de repli vers
ce pays où le cerveau va devoir se battre pour conserver les images qu’il a emmagasinées
durant sa longue vie et bricoler avec un reste de vision périphérique pour inventer ce qu’il ne
voit plus. Peu de temps après, je commence une nouvelle série de photos sur les plages,

J’habite un tourbillon d’écume

fort différente de mon travail passé, qui était précis, net, minutieux et vif. Je ne peux le
dire autrement : jaillissent de mon boîtier des images floues, heurtées, filées, surexposées
qui m’ont fait penser au travail de Gerhard Richter sur le débordement. Il a fallu comme lui
« accepter de perdre l’illusion de l’exactitude, la certitude de ce qui va se produire ». Ce qui
apparaissait nettement à mes yeux se dissolvait aussitôt comme un pigment répandu sur
l’image, accident à la fois graphique et signifiant. Par ces représentations évanescentes de
la réalité, j’espérais rendre compte de sensations paradoxales, imprimer du mouvement aux
postures, rendre visible l’imaginaire, donner une forme aux cris et une chance au hasard.
Comme si les cinq sens…(sens) dessus-dessous, se mélangeaient et s’échangeaient.
On me fait alors prendre conscience que mes photos sont floues depuis que ma mère perd la
vue. Incrédule au départ, je ne peux finalement que l’admettre. Chaque image parle de ce qui
s’efface et porte en elle sa disparition.
A chaque visite la vue de ma mère me préoccupe toujours plus, son regard ne se fixe plus, il
est comme rentré à l’intérieur d’elle-même. Lors de rendez-vous chez l’ophtalmo où je
l’accompagne, l’imagerie médicale, porteuse des pires nouvelles dans cette détérioration
inexorable, me semble fascinante, belle et effrayante à la fois.
Sur mon écran d’ordinateur se bousculent alors des images et des mots inconnus. Maculas
exsudatives, œdèmes, tumeurs oculaires, métamorphopsies, échographies iriennes, plages
floues, courbes, imagerie médicale, paysages dans le brouillard, ruines romaines, comptes-
rendus de protonthérapie s’interpellent, se heurtent, se contredisent ou se ressemblent.
La situation de ma mère me ramène brusquement à ma propre expérience médicale et je revis
cette peur qui nous unit : perdre la vue. Je reprends conscience de cette tumeur irienne,
noire comme une touche de peinture éclaboussant depuis trente ans mon iris, que j’ai appris
à aimer puis à ne plus voir, et qui le rend tout à fait unique.
C’est là que commence « Le temps du chaos » .

Vous pouvez aujourd’hui découvrir quelques chapitres de ce travail:

“Calligraphies des ténèbres”,

“Soleils noirs” et “Nuits blanches”,

et The pink disease”

Exposition collective d’artistes, plasticiens et photographes “LA DANSE DES SIGNES” Galerie Abla Ababou à Rabat (Maroc) à partir du 17 octobre 2024

Vous pouvez venir découvrir ma série

” CALLIGRAPHIE DES TENEBRES”

lors du vernissage qui aura lieu le 17 OCTOBRE à partir de 18H30 et jusqu’au 10 NOVEMBRE 2024

CHEZ

AU 57 AVENUE MEHDI BEN BARKA, RABAT, MAROC

face à l’école Jacques Chirac

Ce nouveau chapitre vient s’ajouter à mon travail en cour

“Journal au Temps du Chaos”,

qui parle d’effacement, d’aveuglement, de perte, d’évanescence…

exposition ‘J’habite un tourbillon d’écume” Toulouse, librairie Ombres Blanches Côté Cour du 15 octobre au 8 novembre 2024

Je suis si heureuse de montrer à Toulouse, la ville de mon adolescence, ma première série marocaine, que certains d’entre vous ont eu l’occasion de voir à Casablanca, Rabat ou Bruxelles en 2022 et 2023. Je serai là pour vous accueillir à la prestigieuse Librairie Ombres Blanches, 50 rue Léon Gambetta pour le

VERNISSAGE, LE 17 OCTOBRE 2024 A 18H

Contemplant la mer à Guernesey, tourmenté par la perte de sa fille, Hugo trouve cette métaphore pour décrire la dévastation de son âme :

« J’habite un tourbillon d’écume »

Pourtant, point de tragédie dans ces images : chorégraphie joyeuse des familles, vent, vagues, c’est l’Atlantique douce des côtes marocaines, où l’on reste longtemps immergé dans la tiédeur mouvante qui libère les corps. Les enfants courent comme nulle part ailleurs, pressés de fuir la vague et de retourner à la battle. Les mères sentinelles sont campées face au large, points fixes anxieux dont les longues robes flottent en tourbillons d’écume. La lumière vibre, l’éblouissement est sonore, l’iode saoule, les cris dessinent des arabesques. C’est précisément de cette expérience sensorielle totale que j’ai voulu rendre compte. « Quand les images sont nettes, tant de détails semblent inexacts et le tout ne va pas non plus. Alors [le flou peut] aider à rendre la peinture invincible, surréelle, plus énigmatique ‒ c’est aussi simple que ça » dit Gerhard Richter. Lors de ma première séance de prises de vue sur les plages marocaines, ce peintre dont j’apprécie autant l’esthétique que la liberté, s’est invité comme une inspiration bienvenue. Les premières images sorties de mon boîtier, heurtées, filées, surexposées et chaotiques, m’ont fait penser à son travail sur le flou et ont pris sens : comme lui, je dirais qu’il a fallu accepter de perdre, en partie, la maitrise et l’illusion de l’exactitude, la certitude de ce qui va se produire. En creusant ce sillon je pouvais espérer rendre compte de sensations paradoxales : imprimer du mouvement aux postures, rendre visible l’imaginaire, montrer la couleur du vent et donner une forme aux cris, un poids aux corps, une énergie à la vague et une chance au hasard…

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